Synthèse
Pendant les premières décennies de la production d’électricité d’origine nucléaire en France, la gestion des déchets radioactifs produits par cette industrie, depuis les mines d’uranium jusqu’au produits de retraitement des combustibles irradiés, n’a pas été une préoccupation importante des gouvernements et des industriels concernés.
L’accélération du programme nucléaire du début des années 1970, notamment du « Plan Messmer » de 1974, a imposé de prendre les choses au sérieux.
Dès les travaux de la Commission Castaing du début des années 1980, le choix s’est orienté vers le stockage géologique profond, avec la condition de la réversibilité, c’est-à-dire la possibilité pour les générations futures de revenir sur un tel choix et donc de récupérer facilement les déchets éventuellement déjà enfouis.
Cette condition de réversibilité fut maintenue par la suite par les décisions des gouvernements et les actes législatifs conduisant à la création d’un laboratoire de recherche sur le site de Bure, puis au projet Cigéo de stockage en profondeur des déchets les plus dangereux sur un site voisin de celui du laboratoire.
Après la déclaration d’utilité publique (DUP) du projet Cigéo, le dossier de la demande d’autorisation de création (DAC), déposé par l’organisme responsable de la gestion des matières et déchets radioactifs, l’ANDRA, est en cours d’instruction par les organismes de sûreté nucléaire, IRSN et ASN, et devrait donner lieu à une autorisation de mise en service à l’horizon 2026-27, après une série de consultations.
En 2023, le Conseil constitutionnel, saisi par le Conseil d’Etat de se prononcer sur une
question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portée par un groupe d’organisations et de personnes privées, a conclu que « … le législateur, lorsqu’il adopte des mesures susceptibles de porter une atteinte grave et durable à l’environnement, doit veiller à ce que les choix destinés aux besoins du présent ne compromettent pas la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins, en préservant leur liberté de choix à cet égard ». Cette décision d’importance historique met en valeur la question de la réversibilité du projet Cigéo, que, dans son analyse, le Conseil constitutionnel a considéré comme acquise.
Afin d’en juger, ce rapport analyse la façon dont la réversibilité du stockage est traitée dans les différentes pièces du dossier de la DAC auquel le lecteur pourra se référer.
Cette analyse conduit à la conclusion suivante :
La réversibilité, possibilité de retirer du stockage l’ensemble des colis du fait d’une décision politique, serait assurée pendant la durée de l’exploitation, donc avant la fermeture définitive, si les alvéoles et les galeries n’étaient pas « colmatées » et par conséquent accessibles. Cette situation peut donc se présenter pour les générations jusqu’à la date de fermeture du site, prévue par l’ANDRA vers la fin du XXIIième siècle.
Cette condition doit donc être imposée dès l’autorisation de création de Cigéo.
Par contre, une fois les galeries, les alvéoles et tous les accès au stockage étant colmatés à la fin de l’exploitation du stockage et à la fermeture définitive, il n’y a plus réversibilité possible pour les générations futures au-delà de cette date.
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