Au sommaire de ce ultime numéro, qui clôt un cycle de publications allant de la Conférence de Rio en 1992 à la COP 21 qui vient de se terminer à Paris, un regard rétrospectif sur les 42 numéros des Cahiers de Global Chance, une analyse très complète de la transition énergétique danoise, ainsi qu’un dossier critique sur la “stratégie” française en matière de gestion des déchets nucléaires français et étrangers.
Avec ce numéro des « Cahiers de Global Chance », notre association met fin à un cycle de publications qui s’étend de la Conférence de Rio à la COP 21 qui vient de se terminer à Paris.
Non pas parce que l’activité de l’association va s’arrêter mais parce qu’il nous semble temps, après le travail d’une génération, de nous poser la question de nos priorités et de nos modes d’action dans un monde, une Europe et une France qui ont beaucoup changé depuis 1992.
L’idée qui avait justifié la création de notre association et le choix de son nom « Global Chance », tirer parti de la prise de conscience des menaces qui pèsent sur l’environnement global du fait des activités humaines pour promouvoir les chances d’un développement mondial équilibré, et que nous avions détaillé dans une Charte, est plus que jamais d’actualité.
Le débat national sur la transition énergétique et plus récemment l’accord de Paris, quelles que soient leurs imperfections et leurs insuffisances, montrent que les réponses aux questions d’environnement global apparaissent plus aujourd’hui non seulement comme indissociables des questions sociales et économiques, mais comme une source majeure des évolutions sociétales que l’humanité doit mettre en place d’urgence pour assurer la pérennité de son développement sur notre planète. L’intuition que la connaissance croissante des conséquences de nos actions sur l’environnement global pouvait être une chance unique de prise de conscience de notre interdépendance profonde et provoquer l’émergence d’un gisement nouveau de solidarités, de modes de vie et de comportements économiques et sociaux à explorer et à exploiter est aujourd’hui au centre des débats sur l’avenir de l’humanité. Au point que certains comptent sur la prise en compte de l’environnement global pour « sauver » la croissance : c’est ce qu’ils appellent la croissance verte !
Durant ces vingt dernières années, les priorités que nous portons ont effectivement pénétré à des degrés divers dans la société française : la question de la maîtrise de l’énergie n’est plus taboue, elle figure même souvent en tête du discours politique, même si les propos sont peu suivis d’effet. La loi sur la transition énergétique en est la preuve puisqu’elle engage la France à une division par deux de sa consommation finale d’énergie en 2050. Une exception cependant pour l’électricité qui, en France, semble échapper à cette simple règle d’efficacité, au nom sans doute de la protection d’une industrie nucléaire en pleine déroute économique et financière. Les énergies renouvelables, ou tout au moins l’électricité renouvelable, plébiscitées par les citoyens, commencent cahin-caha à se faire une place dans notre pays malgré la résistance de la forteresse nucléaire. Le discours sur le nucléaire a lui même évolué : François Hollande a promis de faire passer de 75 % à 50 % sa part dans le mix de production électrique français d’ici 2025. Ou encore, la réduction des émissions de méthane, sujet dont nous soulignons l’importance depuis huit ou dix ans commence à faire l’objet de colloques et de propositions d’industriels. Enfin, plusieurs membres de Global Chance ont joué un rôle important dans le succès, même s’il est évidemment relatif, de la COP 21.
Nous pourrions donc être satisfaits d’avoir participé par notre action à la prise de conscience de ces questions d’environnement et à la mise en lumière de solutions.
Pourtant le paysage français qui se dessine aujourd’hui n’incite pas à l’optimisme. En effet derrière la loi sur la transition énergétique et ses bonnes intentions, quels gestes concrets ? Quand on voit que la version actuelle de la PPE (1) se consacre uniquement à l’offre d’énergie et ne comporte aucune analyse prospective de l’évolution de la demande énergétique française, quand on apprend que la fermeture de Fessenheim est repoussée au-delà de 2017 à une date aussi inconnue que celle du démarrage de l’EPR de Flamanville et qu’aucune programmation de fermeture d’un nombre de tranches nucléaires suffi sant pour respecter la clause de 50 % en 2025 ne semble discutée ni même envisagée, quand on constate que les pouvoirs publics essayent par une série d’artifices législatifs de rendre irréversible l’engagement du chantier d’enfouissement des déchets nucléaires de haute et moyenne activité de Bure sans même avoir une idée de son coût et des risques qu’il engendre, on voit bien que c’est au niveau du passage du discours aux actes que se situe un énorme hiatus. C’est d’ailleurs bien de la même problématique qu’il s’agit pour l’accord de Paris sur le climat.
Et l’on ne peut compter que sur la société civile pour combler le gouffre qui existe aujourd’hui entre le discours officiel et l’action.
L’expertise indépendante que pratiquent des associations comme la nôtre est certes indispensable pour mettre à disposition des citoyens les outils de compréhension et d’interprétation indispensables des faits et des idées. Mais la situation actuelle en montre aussi les limites. Sans l’appropriation et la déclinaison concrète des idées sur le terrain par la société civile, sans la recherche d’alliances citoyennes qui permettent l’établissement d’un rapport de force favorable vis-à-vis des lobbies en place et de l’administration, sans début de mise en œuvre décentralisée chaque fois que la possibilité s‘en présente, les intérêts financiers, l’inertie, les conservatismes suffi sent à paralyser toute idée de changement et de remise en cause de l’existant.
Cette conviction du caractère indispensable de la mobilisation citoyenne au niveau local, national et international exige d’associations comme la nôtre non seulement de maintenir notre compétence et continuer à fournir une analyse indépendante et transparente des questions d’énergie et d’environnement, mais aussi de faire le maximum pour mettre ces analyses à la disposition des organisations de citoyens (ONG, Syndicats, Collectivités territoriales) et des média.
C’est dans cette optique que nous comptons développer notre site www.global-chance.org de telle façon que les lecteurs puissent disposer à la fois : • De fiches de synthèse actualisées sur les grandes questions énergétiques et environnementales. • De dossiers regroupant par thème les articles des Cahiers de Global Chance déjà parus, les notes nouvelles des membres de l’association et des auteurs extérieurs qui nous paraissent les plus pertinents sur les sujets traités • D’articles, d’enregistrements sonores ou vidéo, de notes ou de compte rendus de débats impliquant les membres de notre association.
Dans le présent numéro on trouvera, en plus d’un regard rétrospectif sur les 42 numéros des Cahiers de Global Chance, une analyse très complète de la transition énergétique danoise et trois articles concernant les conséquences du traitement des déchets nucléaires français et étrangers qui viennent remettre sérieusement en cause les « éléments de langage » de la communication lénifiante officielle.
Global Chance
(1) – PPE : Programmation pluriannuelle de l’énergie.
Petit mémento des déchets nucléaires Éléments pour un débat sur les déchets nucléaires en France Les Cahiers de Global Chance, hors-série n°2, septembre 2005, 48 pages
Petit mémento des énergies renouvelables Éléments pour un débat sur les énergies renouvelables en France Les Cahiers de Global Chance, hors-série n°3, septembre 2007, 84 pages