Benjamin Dessus
www.LaRecherche.fr, 5 juin 2009
Propos recueillis par Jacques-Olivier Baruch
Barack Obama a annoncé vouloir bannir toute nouvelle centrale à charbon aux Etats-Unis. Une décision très peu efficace.
L’abandon des centrales à charbon permet-il de réduire les émissions de dioxyde de carbone ?
Bien entendu, à première vue, la construction de centrales à gaz, d’éoliennes ou de centrales nucléaires à la place de centrales à charbon ne peut que réduire les émissions de CO2. Mais pas dans tous les cas. C’est la réponse un peu iconoclaste de deux Américains de la Carnegie Mellon university [1].
Quelle a été leur démarche ?
Ils ont d’abord évalué l’évolution de la demande d’électricité de trois états américains si rien de change au niveau des comportements : en 2030, la demande d’électricité augmenterait de 40% par rapport en 2008, le charbon produirait 1310 térawattheures (TWh soit 10 exposant 12 watts-heure) contre 1020 TWh en 2008, les émissions de CO2 augmenteraient de 30% environ. Puis ils ont imaginé trois scénarios d’arrêt de construction des centrales à charbon à partir de 2012 pour tenir compte des chantiers déjà engagés : dans le premier, le gaz remplace massivement le charbon. Dans le second, ce sont les éoliennes qui en remplacent une grande partie, le solde étant dévolu au gaz. Dans le troisième, on n’utilise pas d’autres formes d’énergies, mais on réalise des économies d’électricité comme les Californiens le tentent aujourd’hui.
Quels sont les résultats en termes d’émission de CO2 ?
Les deux scénarios qui se fondent uniquement sur la substitution des centrales à charbon par le gaz ou l’éolien, ne réduisent les émissions de CO2 que de quelques pourcents par rapport à 2008, mais avec un coût d’électricité à la hausse du fait de l’augmentation inéluctable du prix du gaz. Seul le scénario d’économie d’électricité donne des bons résultats.
Pourquoi l’arrêt de construction des centrales à charbon est-il si peu efficace ?
La demande supplémentaire d’électricité prévue d’ici 2030 implique, même dans le scénario éolien, un recours au gaz, sans compter celui nécessaire à l’alimentation des centrales qui vont remplacer les centrales à charbon déclassées entre 2012 et 2030. Même si les centrales à gaz émettent moins de CO2 au kilowatt-heure que les centrales à charbon, cela ne suffit pas à compenser l’augmentation de la production totale d’électricité. D’autre part, du fait de la durée de vie des centrales déjà construites, 30% de la production d’électricité reste tributaire du charbon en 2030.
Cette analyse vous surprend-elle ?
Pas du tout ! C’est bien ce que l’association Global Chance se tue à expliquer depuis une bonne quinzaine d’années, dans l’indifférence totale ! Seules les économies d’énergies sont efficaces, aussi bien en émissions de CO2 qu’en coût économique.