Page publiée en ligne le 9 juillet 2009
Dernière mise à jour (ajout plans détaillés dans « téléchargements ») : 27 juillet 2017
Sur cette page :
• Téléchargements (article dans sa mise en page d’origine + présentation powerpoint)
• Le vieillissement des installations nucléaires : un processus mal maîtrisé et insuffisamment encadré (Yves Marignac)
• Executive Summary
TÉLÉCHARGEMENTS
Le vieillissement des installations nucléaires : un processus mal maîtrisé et insuffisamment encadré (pdf, 210 Ko)
Yves Marignac, Contrôle (Revue bimestrielle d’information de l’Autorité de Sûreté Nucléaire), dossier n°184 : « La poursuite d’exploitation des centrales nucléaires », juillet 2009, pp. 91-96
>
Un enjeu crucial pour l’industrie
Un manque de retour d’expérience
Un déficit de conception et de connaissances
Des processus complexes mais critiques
Des mesures correctrices limitées
Une vision plus globale du vieillissement
La nécessité de règles et critères clairs
Le vieillissement des installations nucléaires : risques et enjeux (ppt, 2 Mo)
Yves Marignac, Diaporama (31 pages) présenté lors des rencontres transfrontalières « Fermons Fessenheim et sortons du nucléaire » (Strasbourg, Parlement Européen, 1er et 2 octobre 2009)
>
• Un phénomène nouveau
Le vieillissement : un problème abordé sans retour d’expérience
France : un parc nucléaire jeune mais vieillissant
• Un enjeu de sûreté et de sécurité
Le problème du vieillissement : Obsolescence et sénescence / Le vieillissement physique : principaux facteurs / Accumulation de signaux inquiétants
Le cas de Fessenheim
La pression sur la sûreté : La dégradation de la sûreté des installations nucléaires / L’érosion des marges de sûreté
• Un enjeu industriel et financier
L’extension de la durée de vie : un enjeu crucial pour l’industrie
L’extension de la durée de vie : le projet d’EDF
• Un enjeu énergétique et climatique
La place du nucléaire dans les scénarios officiels
Le scénario alternatif négaWatt, une sortie “naturelle” du nucléaire : Le parc nucléaire dans le scénario négaWatt / Le scénario négaWatt : un respect des engagements
• Un enjeu démocratique
Un processus fermé
Un processus long et complexe
Un manque de critères objectifs
• Pistes pour l’établissement de critères objectivables et partagés
LE VIEILLISSEMENT DES INSTALLATIONS NUCLÉAIRES :
UN PROCESSUS MAL MAÎTRISÉ ET INSUFFISAMMENT ENCADRÉ
Yves Marignac (directeur de WISE-Paris [1], membre de Global Chance), Contrôle [2], dossier n°184 : « La poursuite d’exploitation des centrales nucléaires », juillet 2009, pp. 91-96
La vieillesse. C’est la seule maladie dont on ne peut espérer guérir.
Orson Welles, dialogue du film Citizen Kane, 1941
Nous désirons tous atteindre la vieillesse, et nous refusons tous d’y être parvenus.
Francisco de Quevedo, Politica de Dios y Gobierno de Cristo, 1619
Comme tout équipement construit par l’homme, les réacteurs nucléaires subissent l’usure du temps. Derrière ce constat d’évidence se cache une question complexe : quand un réacteur devient-il vieux, et plus précisément trop vieux pour continuer à produire de l’électricité ?
Un enjeu crucial pour l’industrie
Cette question est aujourd’hui d’une importance cruciale pour l’industrie nucléaire. D’un côté, le parc nucléaire installé dans son âge d’or, des années soixante-dix au début des années quatre-vingt, approche voire dépasse les durées de vie présentées comme garanties lors de sa conception. De l’autre, la chute brutale du nombre de nouveaux réacteurs construits dans les deux décennies suivantes prive les exploitants de renouvellement de leurs capacités de production.
L’allongement de la durée de vie des centrales revêt dans ces conditions un double enjeu. Le premier, classique du point de vue économique, est de prolonger – fût-ce au prix de dépenses conséquentes de mise à niveau – l’exploitation d’un outil de production dont l’investissement a été amorti après 20 à 30 années de fonctionnement. Le second, crucial du point de vue industriel, est de retarder un déclin que le niveau actuel de commandes, dans le cadre de l’auto-proclamée “renaissance” du nucléaire, ne suffira pas à enrayer.
La pression de l’industrie est donc très forte pour obtenir des autorités toute extension de durée possible. Aux États-Unis, où les réacteurs ont été initialement autorisés pour une durée de 40 ans à partir de leur permis [3], une campagne de réexamen se poursuit depuis dix ans environ pour accorder au cas par cas une autorisation pour vingt années supplémentaires. En avril 2009, le 52ème réacteur pour lequel une telle demande a été présentée à ce jour – soit exactement la moitié des 104 réacteurs en exploitation dans ce pays – a obtenu cette autorisation. Un second tour d’extensions portant la durée à 80 ans semble même déjà envisagé par certains.
En France, où aucune durée n’a été autorisée a priori, et où la poursuite d’exploitation est accordée réacteur par réacteur tous les dix ans, à l’issue d’une inspection approfondie par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) – la “visite décennale” –, EDF ne cache pas ses intentions. L’exploitant de l’ensemble des 58 réacteurs à eau pressurisée (REP) français a ainsi annoncé en décembre 2008, dans le cadre d’une opération à la bourse de Londres, être « confiant dans l’obtention de l’autorisation de fonctionnement à 40 ans » de ses réacteurs, dont les premiers vont passer l’inspection des 30 ans en 2009, et viser de « porter la durée de vie du parc français significativement au-delà » (c’est-à-dire 60 ans), envisageant pour cela un programme de 400 M€ d’investissement par tranche sur plusieurs années [4].
Un manque de retour d’expérience
Cette confiance étonne, car l’industrie entre en réalité en territoire inconnu. Cela fait seulement 55 ans, depuis la mise en service du premier réacteur de production électronucléaire, en 1954 en Union Soviétique, que le parc nucléaire se développe. Et le retour d’expérience sur le comportement des réacteurs aux durées de vie que certains exploitants semblent tenir pour techniquement acquises est proche de zéro.
Régulièrement mis à jour, le World Nuclear Industry Status Report [5] fournit des chiffres sans appel. La moyenne d’âge des 436 réacteurs en exploitation dans le monde atteint aujourd’hui à peine 25 ans, et seules six unités restant en exploitation ont atteint ou dépassé 40 ans. Le plus ancien réacteur en exploitation, Oldbury A1 (Royaume-Uni), fonctionne depuis 41,5 ans [6]. De plus, un total de 121 réacteurs ont été définitivement arrêtés, avec une durée de vie moyenne qui ne dépasse pas 23 années. Seuls 14 d’entre eux avaient atteint lors de leur fermeture une durée de vie de 40 ans. Le réacteur ayant fonctionné le plus longtemps, Calder Hall (Royaume-Uni), avait atteint 46,5 années d’exploitation lors de son arrêt définitif.
Le retour d’expérience n’est pas meilleur sur la filière des réacteurs à eau pressurisée (REP), à laquelle appartient l’ensemble des 58 réacteurs exploités par EDF en France. Il s’agit en effet d’une filière “jeune”, qui équipe une fraction large (60% des réacteurs et 65% de la capacité installée) mais récente du parc nucléaire mondial (seulement 15% des réacteurs fermés). La moyenne est de 25 ans pour les REP en exploitation, et 23 ans pour les REP fermés, comme pour l’ensemble du parc. Mais aucun REP n’a encore atteint une durée de vie de 40 ans. Le plus âgé est Beznau (Suisse), encore en exploitation, qui atteindra 40 années depuis son couplage au réseau en juillet 2009. En France, la moyenne atteint 22 années, et le plus ancien réacteur est Fessenheim 1, connecté au réseau en mars 1977 et dont se prépare actuellement la troisième visite décennale.
Un déficit de conception et de connaissances
Au manque de retour d’expérience s’ajoute un déficit de conception. Le vieillissement a bien sûr été considéré dans le design des réacteurs. La cuve des réacteurs d’EDF, par exemple, a ainsi été dimensionnée pour résister à l’équivalent de 30 années à pleine puissance d’irradiation. Mais des études poussées n’ont pas été menées sur l’ensemble des composants, et des durées plus longues n’ont pas été prises en compte.
Enfin, le vieillissement des réacteurs reste, sur le plan des connaissances techniques, l’objet de larges incertitudes. Comme le note l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), « les matériels des centrales électronucléaires sont conçus, réalisés et exploités de telle sorte que leur vieillissement prévisible (…) n’affecte pas les critères de sûreté. (…) L’expérience d’exploitation, notamment les résultats des contrôles et des visites périodiques, met cependant en évidence des phénomènes d’endommagement inattendus. (…) Dans d’autres cas, la cinétique de l’endommagement a été plus rapide qu’il n’avait été prévu » [7].
Des processus complexes mais critiques
Le vieillissement affecte ainsi l’ensemble des systèmes intéressant la sûreté :
• le système de confinement, basé sur l’étanchéité d’enceintes successives, dont les éléments structurels du réacteur que sont la cuve et son couvercle, le circuit primaire avec les générateurs de vapeur, et l’enceinte en béton du bâtiment réacteur ;
• le système de conduite du réacteur, incluant l’ensemble des pièces mécaniques internes au cœur qui maintiennent sa géométrie (ancrages, grilles) et contrôlent sa réactivité (barres de contrôle), le câblage et le système de contrôle-commande lui-même ;
• le système de sauvegarde, comprenant les différents équipements intervenant en cas d’incident ou d’accident, tels que les circuits et pompes de secours ou les générateurs diesel.
On peut citer, parmi les principaux processus de vieillissement observés sur ces différents composants :
• les mécanismes de fragilisation, par irradiation ou par contrainte thermique, des tuyauteries, pouvant entraîner une perte de résistance à la rupture, une propagation plus rapide d’éventuelles fissures et une augmentation de la température de transition ductile-fragile [8]. Un phénomène de vieillissement thermique non prévu a ainsi été observé dès les années quatre-vingt sur certaines parties en acier inoxydable austénoferritique moulé du circuit primaire des réacteur français. Aujourd’hui, malgré un important programme de R&D ayant permis de mieux caractériser le phénomène et de développer sa surveillance par des mesures in situ, l’évolution à long terme reste incertaine et préoccupante ;
• les mécanismes de fissuration par corrosion sous contrainte au niveau des couvercles de cuves. Les processus de cette nature restent mal connus et constituent l’un des principaux facteurs d’aggravation non prévue de la sûreté liée au vieillissement. Des fissures ont ainsi été détectées au niveau des adaptateurs des couvercles de cuve par EDF, notamment au Bugey en 1991 et à Fessenheim 2 en 1996. Ce même phénomène a été observé dans d’autres réacteurs, notamment sur celui de Davis Besse, aux États-Unis, où une telle fissure s’est développée pendant plus de 10 ans avant d’être détectée de façon fortuite. Une cavité de 15 cm de profondeur et 17 cm de large s’était formée, la résistance de la cuve ne tenant plus en ce point qu’aux 3 mm d’épaisseur de l’enveloppe externe en acier inoxydable ;
• les différents phénomènes de corrosion, d’usure, de dépôt qui s’exercent au niveau des générateurs de vapeur, entraînant des effets divers, tels que des fissurations traversantes et donc un risque de rupture des tubes de ces générateurs, ou un colmatage des plaques qui les maintiennent, empêchant la circulation d’eau et dégradant donc les performances et la sûreté du fonctionnement. Ces phénomènes touchent aujourd’hui les générateurs de vapeur du parc EDF dans des proportions inattendues, conduisant à un programme lourd d’actions correctives [9] ;
• l’altération, sous l’effet des conditions de température et d’irradiation, des gaines des câbles électriques. Le vieillissement prématuré de câbles de contrôle-commande, dits “câbles Crosne”, suite à un défaut de qualité, a été à l’origine d’un des plus graves incidents connus par le parc nucléaire, le 14 avril 1984 sur le réacteur Bugey 5 [10] ;
• l’évolution des bétons, susceptible d’entraîner une perte d’étanchéité des enceintes en situation accidentelle. La tenue de l’enceinte de confinement des réacteurs 1300 et 1450 MWe d’EDF, caractérisée par une double enveloppe en béton sans peau étanche métallique, repose sur la résistance de la première enveloppe à une rupture brutale du circuit primaire. Cette résistance est obtenue par une précontrainte à la construction, dont l’efficacité diminue en réalité plus vite que prévu à la conception du fait du retrait et du fluage du béton.
Ainsi le vieillissement physique se traduit essentiellement par deux tendances :
• une augmentation progressive du nombre d’incidents ou d’événements significatifs tels que fissures, fuites, court-circuits, etc. [11] ;
• un affaiblissement croissant des matériaux pouvant déclencher des situations accidentelles ou aggraver leurs conséquences.
Bien que non linéaires et aléatoires pour beaucoup, ces phénomènes deviennent assez vite statistiquement significatifs, et réduisent réellement le niveau de sûreté des réacteurs à partir d’une vingtaine d’années de fonctionnement [12].
Des mesures correctrices limitées
On voit donc à la fois les conséquences graves que le vieillissement peut avoir sur la sûreté, et la difficulté à prévoir, surveiller et remédier les différents phénomènes en jeu. On distingue en général trois types de mesures envisageables pour lutter contre le vieillissement :
• la surveillance, dont l’efficacité est limitée par le caractère potentiellement diffus, aléatoire ou non linéaire de certains processus, et par les contraintes d’accessibilité des différents composants ;
• la réduction des charges, qui consiste à mettre en place des dispositifs de compensation ou à faire évoluer le domaine de fonctionnement du réacteur pour diminuer les effets liés notamment aux contraintes thermiques et d’irradiation. Ce type d’action peut avoir un effet négatif sur la productivité du réacteur ;
• le remplacement des composants, qui est une solution coûteuse et limitée dans tous les cas aux équipements techniquement remplaçables – ce qui n’est pas le cas de la cuve et de l’enceinte notamment.
Il est à noter que la problématique du vieillissement et la démarche envisageable pour en maîtriser les conséquences ne se limitent pas aux seules centrales. Elle s’appliquent également aux grandes installations de R&D et surtout aux usines, dont la diversité est toutefois aussi marquée en France que l’est la standardisation des réacteurs. Cette hétérogénéité rend l’acquisition de connaissances, l’élaboration de mesures correctives et l’application de bonnes pratiques encore plus difficiles.
Une vision plus globale du vieillissement
Les difficultés et les coûts engendrés par une action à l’efficacité limitée peuvent conduire à laisser se réduire la marge de sûreté, c’est-à-dire l’écart supposé entre le niveau de sûreté minimal de sûreté du réacteur requis par les autorisations et le niveau réel, censé être supérieur [13]. La figure 2 illustre la façon dont le vieillissement et sa gestion, parmi d’autres facteurs, peuvent influer sur cette marge. Cette réflexion appelle également à développer une vision plus large du vieillissement.
En premier lieu, le vieillissement d’un réacteur est aussi celui de sa conception et de son dimensionnement, largement figés à la construction alors que les connaissances et l’acceptabilité évoluent, et les exigences de sûreté avec elles. L’écart croissant qui se crée au fil de l’exploitation ne peut être que partiellement compensé par les rééquipements et les mises en conformité.
Les difficultés éprouvées pour renforcer la résistance des réacteurs d’EDF face à l’évolution des normes sismiques illustrent ce phénomène. L’impossibilité d’intégrer a posteriori, après le 11 septembre 2001, de nouvelles exigences de résistance des réacteurs ou des autres installations aux chutes d’avion démontre les limites d’une démarche d’adaptation.
Un autre facteur de vieillissement est l’évolution des technologies, qui peut conduire à l’obsolescence d’équipements choisis au moment de la conception. Le cas le plus critique est peut-être en France celui du contrôle-commande des réacteurs 900 MWe, reposant sur une technologie dite de relayage électro-magnétique dont la discipline n’est plus pratiquée ni même enseignée aujourd’hui. Outre la difficulté à conserver une compétence pour utiliser et contrôler les équipements obsolètes se pose la question des capacités techniques et industrielles pour en assurer la maintenance, voire le remplacement.
La question du maintien des capacités nécessaires à la maîtrise d’un réacteur peut se poser plus globalement. Elle concerne d’abord les ressources humaines, c’est-à-dire l’existence en nombre suffisant d’ingénieurs et de techniciens qualifiés et expérimentés. Elle s’applique ensuite au tissu industriel. L’IRSN pointait en 2003 les incertitudes sur les possibilités de remplacement de matériels usés ou obsolètes après les troisièmes visites décennales [14]. Le problème se pose en réalité déjà à EDF, qui doit de plus en plus remettre en place des équipements démontés lors des arrêts de tranche pour être remplacés, faute de disposer des pièces de rechange [15]. Ce problème résulte également d’une gestion en flux tendu liée à une exigence croissante de rentabilité. Cet aspect souligne la nécessité, pour finir, d’intégrer également une préoccupation sur la capacité financière des exploitants à faire face à tout moment de la vie d’un réacteur à l’ensemble des coûts correspondant à sa durée de vie projetée.
La nécessité de règles et critères clairs
Les mécanismes en jeu dans la gestion du vieillissement appellent au vu de ce tableau général un contrôle vigilant. Le problème est qu’aucun pays n’a développé un ensemble cohérent de critères pour définir les conditions entraînant un arrêt pour cause de vieillissement. Les autorités procèdent en réalité à l’inverse, en accordant, selon des modalités qui varient d’un pays à l’autre, des extensions d’exploitation.
L’échéance à laquelle parvient en 2009 le parc nucléaire français, avec les premiers exercices de troisième visite décennale, aurait dû permettre d’engager ce débat fondamental avec l’ensemble de la société : selon quelles règles, sur la base de quels critères ces réacteurs seront-ils autorisés à poursuivre leur exploitation ou au contraire arrêtés ?
Lorsqu’on se souvient, par exemple, que l’ASN affirmait dès 1995 la nécessité, au vu de l’évolution des exigences de sûreté, d’appliquer un standard plus élevé que celui des plus récents réacteurs du palier N4 pour de nouvelles constructions [16], il ne paraît pas trivial de laisser des réacteurs de conception plus ancienne encore et fatigués par le vieillissement fonctionner sans se poser une question de cohérence.
WISE-Paris a développé en 2004, dans le cadre de débats sur ce type de question en Suisse, une étude pour identifier différentes bases envisageables pour l’élaboration de critères d’arrêt des réacteurs vieillissants [17].
Les pistes proposées portaient notamment sur :
• l’établissement de critères quantitatifs directement basés sur des limites de dégradation par des processus physiques des différents composants, structures et systèmes,
• une approche quantitative plus fine basée sur des seuils d’augmentation de probabilité d’accident à ne pas dépasser dans le cadre des évaluations probabilistes de sûreté ;
• en complément, l’application de critères qualitatifs liés à la mise en œuvre ou non de bonnes pratiques de l’exploitant dans l’ensemble des tâches de gestion, voire d’auto-surveillance attachées à la maîtrise du vieillissement (par exemple en matière d’information, de contrôle, de planification, etc.) ;
• enfin, le développement de critères relatifs à la capacité financière de l’exploitant à faire face aux différentes charges, y compris celles résultant de la gestion du vieillissement. On pourrait étendre ces critères aux capacités techniques et industrielles, c’est-à-dire par exemple à l’existence de personnels hautement qualifiés en nombre suffisant, ou encore à la disponibilité des services de maintenance et des pièces de rechange.
Ces propositions n’ont qu’un caractère exploratoire. Elles constituent néanmoins une première base pour développer avec les parties prenantes une véritable réflexion visant à élaborer des critères d’arrêt simples, clairs, acceptables et vérifiables – et lutter contre la tendance spontanée à laisser le vieillissement grignoter les marges de sûreté. Il vaudrait mieux, dans l’intérêt de tous, qu’une telle démarche aboutisse avant que les défaillances inéluctables qu’il s’agit d’éviter ne surviennent.
EXECUTIVE SUMMARY
The aging of nuclear facilities : a badly managed and inadequatly supervised proccess
Faced to the ageing of their nuclear capacities, utilities like EDF are pushing to develop and obtain life extension schemes. There is, however, only too little experience with reactors operating for more than 40 year. The ageing processes have not been fully included in the original design of the reactors, and there are still important gaps in understanding some of them. Ageing, however, might affect various performances of virtually all components participating to the safety of the reactor, leading to an increased number of incidents and an increased risk of more serious accidents that become significant after two decades or more of operation. Corrective action can only be limited, and has to be considered in a global set of factors including ageing design, obsolescent technologies, and evolving capacities in terms of human ressources, industrial services or financial means. This all points to the need to set simple, applicable and verifiable criteria defining the conditions for shutting-down ageing reactors that don’t exist as such in current regulations.